L’immobilier professionnel ou comment déboussoler un dirigeant

Quiconque s’est aventuré dans un projet d’acquisition d’un bien immobilier au service de son activité professionnelle s’est nécessairement retrouvé dans une situation fort inconfortable, ballotté au gré de conseils contradictoires. Et pour cause, le projet d’achat par le dirigeant d’un bien immobilier professionnel est source de nombreuses affirmations, certaines erronées, d’autres véridiques. Passons en revue quelques exemples édifiants.

1. "Il faut acheter par le biais d’une société" : Certainement, mais attention à bien la choisir

Utiliser une société pour acquérir le bien est souvent la base de l’opération. Toutefois, deux sociétés doivent être la plupart du temps exclues :

La société d’exploitation elle-même

Si le bien immobilier professionnel est intimement lié à l’activité professionnelle, il n’en demeure pas moins qu’il faut éviter de les cumuler dans une même société. Ils relèvent en effet de deux logiques différentes du point de vue de la stratégie du dirigeant (impôts, taxes, retraite, transmission).

Une société préexistante qui est propriétaire d’immobilier non professionnel

Dans le même ordre d’idées, les immeubles inscrits dans des sociétés propriétaires d’immeubles non professionnels (immeubles de rapport, logements saisonniers, logements meublés, etc.) font difficilement bon ménage avec un immeuble professionnel. L’eau et l’huile ne se mélangent pas, les catégories d’immeuble non plus.

2. "Une société va protéger…  

… le dirigeant face aux banques" : Faux

La « responsabilité limitée aux apports » ne protège pas entièrement le dirigeant. Les garanties de remboursement de prêts peuvent s’étendre à l’hypothèque sur l’immeuble, au nantissement sur les parts sociales ou actions de la société. Et la caution personnelle du dirigeant, si elle est donnée, l’expose sur l’ensemble de son patrimoine.

… la ou les famille(s) du dirigeant" : Vrai

Par des actions au cours de sa vie, le dirigeant a créé un espace où interagissent différents éléments : des revenus, un patrimoine, une protection, des héritiers… Les aléas de la vie l'amènent à devoir composer avec ces éléments qui devront être analysés afin de garantir à l’ensemble des membres de la ou des famille(s) du dirigeant une protection efficace. Celle-ci passe par une parfaite harmonie et composition entre les innombrables instruments en présence (clauses particulières dans les statuts des société, les contrats d’assurance, le testament, le mandat de protection future, etc.).

La seule limite à toutes les possibilités existantes est celle de l’imagination. La société peut donc constituer un outil de protection pour la famille du dirigeant.

3. "Grâce à une société, il sera plus facile de vendre" : Vrai ou Faux, selon la situation

La réponse dépend de ce que souhaite le dirigeant mais également le futur acquéreur. A l’heure de se retirer des affaires :

  • l’activité sera-t-elle cédée à un repreneur ?
  • le repreneur souhaitera-t-il acquérir ensemble l’activité et l’immeuble professionnel ?
  • le dirigeant souhaitera-t-il conserver une source de revenus régulière grâce à l’immeuble ?

C’est à l’instant T que l’affirmation sera vérifiable.

4. "Grâce à une SCI, le dirigeant paiera moins, voire pas d’impôt" : Faux

Créer une SCI dans le seul et unique but de permettre à un dirigeant de ne pas payer d’impôt est illusoire. Deux régimes fiscaux existent (impôt sur le revenu / impôt sur les sociétés) et leurs avantages respectifs dépendent de l’instant où l’on observe leurs effets. Tout dépend de la perspective :

  • soit T1 : les conséquences juridiques, fiscales, financières tout au long de la détention des parts de la SCI ;
  • soit T2 : les conséquences juridiques, fiscales, financières lors de la cession des parts de la SCI.

Le législateur a bien fait les choses… Si un régime offre des avantages tout au long de la période T1, il entraîne de lourds inconvénients en T2. Et la réciproque est également vérifiable : des avantages observés en T2 peuvent n’avoir eu que des inconvénients tout au long de la période T1.

Toutefois, certaines pistes d’optimisation s’ouvrent en isolant la nue-propriété de l’usufruit sur la tête de deux personnes différentes, pendant une durée déterminée. Il a ainsi pu être constaté que de nombreux avantages en T1 et en T2 pouvaient se cumuler ! « La cession d’usufruit temporaire » peut s’avérer d’une grande efficacité. Elle doit toutefois être réalisée par des spécialistes sensibilisés au strict respect d’une procédure particulière, tant les conséquences d’une maladresse seraient hautement préjudiciables pour le dirigeant.

5. "La SCI est la seule société qui fonctionne pour l’immobilier" : Faux

Certains opposent à la SCI d’autres modèles juridiques aux effets juridiques et fiscaux aussi positifs que la SCI, et offrant encore plus de sécurité pour le dirigeant. Les premiers résultats observés sont particulièrement concluants. L’expérience mérite toutefois d’être soumise à l’épreuve du temps et des contrôles, avant de confirmer que la SCI est dépassée pour certaines opérations portant sur de l’immobilier professionnel.

D’ici là, le dirigeant aura déjà réécrit son histoire…

Cédric Altmeyer

Cette application ne fonctionnera qu'à partir d'une résolution minimale de 1024px de large et de 768px de haut.

Merci d'utiliser un ordinateur ou tablette avec une resolution (ou fenêtre) plus importante.